Requalification des 5 ans de CDD d’intérim en CDI d’un salarié intérimaire (CA Versailles 3 décembre 2015)

Maître Frédéric CHHUM est avocat de l’intérimaire.

Monsieur X a été délégué par la société Randstad, en qualité de salarié intérimaire, au sein de la société Calberson par différents contrats de mission entre le 25 octobre 2006 et le 28 octobre 2011 ;

1)Sur la demande tendant à la requalification en contrat à durée indéterminée

Les dispositions de l’article L 1251-40 du Code du travail, qui sanctionnent l’inobservation par l’entreprise utilisatrice des dispositions des articles L 1251-5 à L 1251-7, L 1251-10 à L 1251-12, L 1251-30 et L 1251-35 du même code, n’excluent pas la possibilité pour le salarié d’agir contre l’entreprise de travail temporaire lorsque les conditions à défaut desquelles toute opération de prêt de main-d’oeuvre est interdite n’ont pas été respectées ; que d’autre part, il résulte des articles L 1251-36 et L 1251-37 du Code du travail   que l’entreprise de travail temporaire ne peut conclure avec un même salarié sur le même poste de travail, des contrats de mission successifs qu’à la condition que chaque contrat en cause soit conclu pour l’un des motifs limitativement énumérés par le second de ces textes, au nombre desquels ne figure pas l’accroissement temporaire d’activité ;

Il ressort des éléments de l’espèce que les contrats de mission se sont succédé, sans respect du délai de carence, au profit de Monsieur X pour pourvoir, au sein de la société Calberson, le même poste d’agent d’exploitation, afin d’assurer le remplacement de salariés absents ou pour faire face à un accroissement temporaire d’activité ;

Ce dernier motif n’entrant pas dans les prévisions de l’article L 1251-37 du Code du travail, il apparaît que la société Randstad, entreprise de travail temporaire, a failli à ses obligations ; qu’il convient, en conséquence, de requalifier la relation de travail en contrat à durée indéterminée avec la société considérée ; 

Il résulte de l’article L 1251-41 du Code du travail, que lorsqu’il est fait droit à la demande du salarié tendant à voir requalifier un contrat de mission en contrat de travail à durée indéterminée, il est alloué à ce dernier une indemnité, à la charge de l’entreprise utilisatrice, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire ; que la base de calcul de cette indemnité est celle du dernier salaire mensuel perçu par le salarié.

En l’espèce que compte tenu de la durée de la période d’emploi du salarié, il sera fait une juste appréciation de son préjudice par l’allocation d’une somme de 4000 € devant exclusivement être mise à la charge de la société Calberson.     

2)Sur les circonstances de la rupture des relations contractuelles et leurs conséquences

Monsieur X soutient que le licenciement dont il a été l’objet est entaché de nullité dans la mesure où la rupture des relations contractuelles est  intervenue en violation de son droit d’ester en justice.

Toutefois il ressort de l’examen des pièces de la procédure que si le salarié a saisi le Conseil de prud’hommes d’une demande tendant à la requalification de son contrat le 7 octobre 2011, la société Randstad n’a été informée de cette saisine que le 8 décembre 2011 soit plus d’un mois après le terme du dernier contrat intervenu le 28 octobre 2011 ; qu’il n’apparaît pas, au regard de ces circonstances, que l’absence de conclusion d’un nouveau contrat avec la société  de travail temporaire soit liée à l’action en justice entreprise par le salarié ; qu’il convient, en conséquence, de rejeter les demandes afférentes à la nullité du licenciement.

En définitive que le contrat de travail de l’appelant ayant été rompu du seul fait de la survenance du terme des contrats à durée déterminée requalifiés en un contrat à durée indéterminée, cette rupture s’analyse en un licenciement, nécessairement sans cause réelle et sérieuse en l’absence de lettre de licenciement.

En conséquence que la société Ranstad doit être condamnée à verser au salarié l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents (soit 4267, 56 € et 426, 76 €) ; qu’au titre de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, il y a lieu d’allouer au salarié la somme de 12802, 68 € et de débouter Monsieur X de sa demande tendant, à ce titre, au versement d’une somme de 50000 € laquelle n’est pas justifiée par les éléments de l’espèce ;    

Monsieur X soutient que le licenciement est intervenu dans des circonstances vexatoires ; que,  toutefois, au-delà des allégations du salarié à ce propos aucune circonstance de l’espèce ne révèle la caractérisation de telles circonstances ; que la demande de dommages-intérêts formée, de ce chef, doit être rejetée ;  

En conclusion, la Cour d’Appel condamne la société Randstad à verser à Monsieur X les sommes suivantes :

. 4267, 56 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et

. 426, 76 € au titre des congés payés y afférents

. 12802, 68 € au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,  

. Condamne la société Calberson Paris Europe à verser à Monsieur X la somme de 4000 € à titre d’indemnité de requalification,

Y ajoutant,

. Condamne la société Calberson Paris Europe à verser à Monsieur X une somme de 1000 € par application de l’article 700 du Code de procédure civile,

. Condamne la société Randstad  à verser à Monsieur X une somme de 1000 € par application de l’article 700 du Code de procédure civile.

 

Frédéric CHHUM Avocat à la Cour

4, rue Bayard 75008 Paris

Tél : 01 42 89 24 48 Ligne directe : 01 42 56 03 00

e-mail : chhum@chhum-avocats.com

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