Préjudice nécessaire - Droit à l’image d’un salarié : sa violation par l’employeur ouvre nécessairement droit à réparation (c. cass. 14 février 2024, n° 22-18.014)

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La chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 14 février 2024 (n° 22-18.014), rappelle que la simple constatation de la violation du droit à l’image d’un salarié ouvre droit à réparation.

1) Faits et procédure.

Un salarié exerçait en qualité de conseiller art de vivre, en charge de fonctions de conciergerie, pour la société American Express Carte - France.

Licencié par lettre du 1ᵉʳ mars 2017, le salarié a saisi la juridiction prudhomale par requête reçue le 17 août 2017 de diverses demandes à titre salarial et indemnitaire, notamment au titre de la violation de son droit à limage.

La Cour d’appel de Versailles, dans un arrêt du 21 avril 2022, a débouté le salarié de ses demandes de dommages-intérêts pour utilisation abusive de son droit à l’image en 2012 et 2015 aux motifs qu’il ne produit aucune pièce utile à l’appui de sa prétention, notamment pas le document critiqué, et ne met donc pas la cour en mesure d’apprécier la réalité de l’atteinte invoquée.

Le salarié a alors formé un pourvoi en cassation.

Le salarié fait valoir au soutien de son pourvoi que :

  • la seule constatation d’une atteinte au droit à l’image ouvre droit à réparation ;
  • qu’en le déboutant de sa demande d’indemnisation pour atteinte à son droit à l’image, au motif qu’il ne produisait pas le document critiqué, ne la mettant de ce fait pas en mesure d’apprécier la réalité de l’atteinte invoquée, après avoir pourtant relevé que l’employeur avait expressément reconnu avoir diffusé, auprès de ses clients, une plaquette de présentation des concierges, comportant une photographie du visage et une du buste de chaque concierge et des photographies collectives de ces derniers, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et a violé l’article 9 du Code civil.

2) Solution.

La chambre sociale donne raison au salarié et casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles.

Les juges de la Haute cour commencent par rappeler qu’il résulte de l’article 9 du Code civil que

« le droit dont la personne dispose sur son image porte sur sa captation, sa conservation, sa reproduction et son utilisation, et que la seule constatation d’une atteinte ouvre droit à réparation ».

En l’espèce, la Cour d’appel de Versailles a débouté le salarié de ses demandes de dommages-intérêts au titre de son droit à l’image en retenant que le salarié ne produisait aucune pièce utile à l’appui de sa prétention et ne mettait donc pas la cour en mesure d’apprécier la réalité de l’atteinte invoquée.

Or, la société a elle-même reconnue l’utilisation de l’image du salarié sur une plaquette de présentation des concierges, adressée aux clients, réalisée à partir des photographies individuelles du visage et du buste des concierges ainsi que de photographies collectives.

La chambre sociale censure ce raisonnement et considère que :

« En statuant ainsi, alors que l’employeur ne contestait pas avoir utilisé l’image du salarié pour réaliser une plaquette adressée aux clients, que le salarié faisait valoir dans ses écritures qu’il n’avait pas donné son accord à cette utilisation et que la seule constatation de l’atteinte au droit à l’image ouvre droit à réparation, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».

3) Analyse.

Cet arrêt ne pose pas de solution nouvelle.

En effet, la Cour de cassation a déjà eu l’occasion de juger que la seule constatation de l’atteinte au droit à l’image ouvre droit à réparation dans un arrêt du 19 janvier 2022 (n°20-12.420).

Cet arrêt d’espèce doit attirer l’attention des employeurs : toute utilisation de l’image des salariés nécessite leur accord, même si cette image est utilisée sur des plaquettes destinées aux clients de la société.

En outre, cet arrêt est intéressant sur le plan probatoire : le salarié ne rapporte pas la preuve de l’utilisation de son image, mais la Cour considère que la constatation de l’atteinte au droit à l’image résulte du propre aveu de la Société.

Sources

Cass. soc., 14 février 2024, n° 22-18.014.

Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)

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