Licenciement - Action d’un salarié en nullité de son licenciement fondé sur un harcèlement moral allégué = prescription de 5 ans (cass. soc. 4 sept. 2024, 22-22.860)

Dans un arrêt du 4 septembre 2024 (n° 22-22.860) publié au bulletin, la chambre sociale de la Cour de cassation apporte d’importantes précisions sur les délais de prescription applicables en matière de contentieux du travail.

Elle y distingue clairement deux types d’actions intentées par un salarié licencié : l’action en nullité du licenciement fondée sur le harcèlement moral, et la demande de versement de l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

Elle juge d’une part que la première relève du délai de prescription quinquennal de droit commun, prévu à l’article 2224 du Code civil, et non du délai d’un an applicable aux litiges relatifs à la rupture du contrat.

D’autre part, elle décide que la seconde, bien qu’intervenant au moment de la rupture, est rattachée à l’exécution du contrat et se prescrit par deux ans, conformément à l’article L1471-1, alinéa 1ᵉʳ, du Code du travail.

Cette décision, loin d’être anodine, illustre l’importance pour les juges du fond de tenir compte de la nature de l’obligation invoquée dans la détermination du délai de prescription.

I. Les faits.

Un salarié, recruté en mars 2015 par la société Aries Packaging, en tant qu’automaticien, est licencié le 3 septembre 2018.

Contestant cette rupture, il saisit le conseil de prud’hommes le 14 février 2020, soit plus d’un an après son licenciement, en formulant plusieurs demandes liées tant à l’exécution qu’à la rupture de son contrat de travail.

Il soutient notamment que son licenciement est nul car fondé sur une situation de harcèlement moral, et réclame également le versement d’une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, estimant que l’employeur avait volontairement omis de déclarer une partie de son activité.

II. La solution.

La Cour de cassation valide la position de la cour d’appel et rejette le moyen principal de l’employeur concernant le travail dissimulé en jugeant que cette indemnité sanctionne une inexécution du contrat, et non la rupture elle-même.

Elle rappelle que « la durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée », une action portant sur l’exécution du contrat de travail, même lorsqu’elle vise une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, relève du régime de prescription biennale prévu à l’article L1471-1 du Code du travail.

Ce texte dispose que toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où le demandeur a connu ou aurait dû connaître les faits permettant d’exercer son droit.

Or, dans cette affaire, le salarié avait engagé son action moins de deux ans après son licenciement. Sa demande était donc bien recevable.

Dans un second temps, la haute juridiction censure l’arrêt d’appel s’agissant de la prescription de l’action fondée sur le harcèlement moral.

La cour rappelle que l’article L1471-1, alinéa 2, du Code du travail, qui prévoit un délai de douze mois pour les actions relatives à la rupture du contrat, ne s’applique pas aux actions en réparation exercées en application de l’article L1152-1 du Code du travail, lequel concerne les situations de harcèlement moral.

En conséquence, l’action du salarié n’est pas prescrite, et relève du délai de cinq ans prévu par l’article 2224 du Code civil, qui commence à courir à partir du moment où le salarié a connaissance des faits lui permettant d’agir.

III. L’analyse.

Cette solution prolonge une jurisprudence antérieure selon laquelle la qualification de l’action est déterminante pour fixer le délai applicable.

La Cour de cassation opère ici une lecture rigoureuse de la distinction opérée par l’article L1471-1 entre les actions relatives à l’exécution et celles relatives à la rupture du contrat.

S’agissant de l’action en nullité du licenciement pour harcèlement moral, elle réaffirme une jurisprudence désormais constante : ces litiges relèvent du délai de prescription de droit commun de cinq ans, dès lors qu’ils trouvent leur fondement dans l’article L1152-1, expressément exclu du champ d’application du délai d’un an.

Cette position se justifie pleinement par la gravité des faits allégués et l’exigence de protection du salarié victime.

Concernant le travail dissimulé, la cour clarifie pour la première fois un point jusque-là incertain en jurisprudence dans le contexte post-réforme de 2017.

Si certains pouvaient considérer que cette demande relevait du droit de la responsabilité ou même d’une action quasi-pénale, la Cour de cassation tranche nettement en considérant que l’indemnité prévue par l’article L8223-1 vise à réparer une inexécution antérieure à la rupture et se rattache à l’exécution du contrat.

Elle adopte ainsi une approche pragmatique, conforme à la nature de la créance invoquée. Cette précision est d’autant plus importante que l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, bien qu’autonome dans son fondement, trouve son origine dans la relation de travail.

Ce raisonnement trouve notamment un écho dans la jurisprudence constitutionnelle, qui qualifie cette indemnité de réparation forfaitaire d’un préjudice lié à la perte de droits sociaux.

 

Pour lire l’intégralité de l’article, cliquez sur le lien ci-après

https://www.village-justice.com/articles/action-salarie-nullite-son-licenciement-fonde-sur-harcelement-moral-allegue,53629.html

 

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Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)

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